mardi 3 octobre 2017

Un petit matin d'éternité






Un petit matin d’éternité, triptyque photo,
© Didier Frouin-Guillery, 2017
 




Ce matin-là, tu es parti à l’aube jeter tes lignes et relever tes casiers. Ton vieux dériveur, un quat’vingt des années 60, te servait de bateau de pêche jusqu’à ce que tu construises un bon grand bateau en bois ; alors tous ces matins-là, tu descendais la cale de Larvor avec ton annexe pour rejoindre ton Pen Glaz, le fièrement bien nommé.

 
Ce matin-là, tu as retrouvé ton jeune chat siamois tout noir et tout luisant ; la nuit, il avait exploré la cale et plongé dans un seau de goudron abandonné par un pêcheur. Tu l’as sauvé en dégraissant patiemment son poil, ses yeux et ses oreilles, avec du beurre.

Ces matins-là, ton chat te suivait et sautait dans le bateau pour accompagner ta partie de pêche. Il revenait toujours assis à l’avant du bateau, tel une figure de proue ; il était aussi prêt à sauter dans l’eau pour revenir plus vite à terre quand il nous apercevait sur la plage.

Ce matin-là, alors que depuis trop longtemps tu étais égaré dans les brouillards de ta mémoire, tu as pris une dernière fois le Pen Glaz et tu as trouvé une mer de ciel sans brume et sans nuages pour nous quitter dans un dernier souffle…

 
 


 
 
Au banjo, Marcel,
mon (beau-)père de cœur...
20 janvier 1925 – 20 septembre 2017